Faire des FADH une vraie institution. Une vraie armée. C’est la vision que se donne le gouvernement, surtout face à la faible réponse des forces de sécurité nationale aux violences des gangs ces dernières années. Pour le ministre de la Défense, il est primordial de redéfinir certaines coopérations avec les pays de la région, notamment au niveau de sécurité et de défense, pour de meilleurs résultats.
Après avoir rencontré la veille les responsables du Département de la sécurité hémisphérique de l’OEA, le ministre Jean-Marc Bertier Antoine a été accueilli ce mardi 22 octobre à Washington à la Maison des Soldats par le président de la Junte interaméricaine de défense (JID), Carlos Alvarez et d’autres responsables de l’institution. Encore une fois, le ministre a fait part des ambitions, de la vision du gouvernement pour renforcer les forces de sécurité nationale, notamment les Forces armées d’Haïti. Le ministre a affirmé que la réponse policière seule ne suffisait pas à rétablir l’ordre. Il compte sur le support de la JID pour moderniser les FADH. « La refondation d’une force militaire nationale, moderne et compétente, n’est plus simplement un choix, mais une nécessité vitale pour la survie et la stabilité de notre pays », a-t-il soutenu, dans un discours prononcé un peu plus tard devant le Conseil des délégués de la Junte interaméricaine de défense, qui regroupe des partenaires clés pour Haïti.
« Notre vision est celle d’une armée résolument orientée vers la protection des droits humains et la promotion du développement national. Il s’agit d’une armée tournée vers l’avenir, ancrée dans des valeurs de professionnalisme et de respect », a poursuivi le ministre, dont le rêve est de voir les FADH comptent 20 000 militaires en son rang dans cinq ans. « Nous nous engageons à former 20 000 militaires au cours des cinq prochaines années, à raison de 4 000 recrues par an. Ce modèle est non seulement plus durable, mais également plus viable économiquement », a dit Jean-Marc Bertier Antoine, qui a rencontré un peu plus tard des représentants de plus d'une quinzaine de pays « désireux de contribuer à la lutte contre l’insécurité en Haïti ».
Une commission ad hoc pour matérialiser le projet…
Comment former quatre mille militaires par année ? Pour atteindre cet objectif, le ministre, à la tête d’une délégation composée entre autres du représentant a.i. d'Haïti auprès de l’OEA, Gandi Thomas, a proposé la création d’une commission ad hoc réunissant des représentants du ministère de la Défense, de la Junte interaméricaine de défense, du Collège interaméricain de défense, du Département de la Sécurité Hémisphérique de l’OEA, ainsi que des États membres et observateurs de l’OEA. Cette commission aura pour mandat de coordonner les efforts internationaux en matière de formation, d’assistance technique et d'équipements en vue du renforcement des capacités des Forces Armées d'Haïti. « Cette commission aura pour mission de coordonner et de superviser le processus de formation des 20 000 officiers, sous-officiers et soldats. L’objectif est d’assurer une approche intégrée, efficace et transparente dans toutes les phases de cette initiative, depuis la formation des recrues jusqu’à leur déploiement opérationnel », a indiqué le ministre de la Défense.
« Il est impératif de renforcer les capacités opérationnelles de nos forces armées afin qu’elles puissent non seulement assurer la défense de l’intégrité territoriale, mais également jouer un rôle actif dans la restauration de la paix et de la stabilité dans les zones les plus affectées par la violence », a insisté Jean-Marc Bertier Antoine, qui a sollicité par ailleurs le soutien de la JID pour offrir à aux soldats haïtiens des formations spécialisées dans divers domaines tels que la gestion des crises, la lutte contre le terrorisme, le maintien de l’ordre et la sécurité dans les zones de conflit. « Il est crucial de moderniser nos infrastructures de formation et de doter nos forces des équipements nécessaires, tels que des véhicules blindés, des drones et des technologies de surveillance. La numérisation de nos systèmes de gestion et l’amélioration des conditions de travail de nos militaires figurent également parmi nos priorités pour bâtir une armée professionnelle et motivée », a énuméré le ministre.
Depuis plus de trois ans, les gangs font la loi à Port-au-Prince et dans certaines communes de l’Artibonite. La capitale est pratiquement coupée des villes de province par voie terrestre. Les gangs ont imposé des droits de passage aux entrées sud et nord de Port-au-Prince dont une grande partie est contrôlée par les criminels. Une situation qui a de graves conséquences sur tous les secteurs de la vie nationale. Malgré la présence des troupes de la Mission multinationale d’appui à la sécurité dirigée par le Kenya pour supporter les opérations de forces nationales, les gangs ne se montrent toujours pas inquiétés. Ils ont une nouvelle fois mené cette semaine des assauts contre le quartier Solino, poussant des milliers de personnes à fuir leur demeure.