La société haïtienne apprend à faire face à de nombreux problèmes qu'elle n'avait jamais vraiment eu à gérer dans le passé. L'acculturation, la dégradation de la situation socio-économique, la démission des parents, le manque de préparation des formateurs, le manque d'éducation et de préparation de la jeunesse, l'influence néfaste de certaines émissions de télévision, l'irresponsabilité des institutions étatiques, autant de causes qui justifient la déliquescence de nos valeurs morales, l'augmentation de la délinquance et de la criminalité et l'expansion continue de la prostitution. Si, en général, le mot « prostituée » s'applique à une catégorie de gens bien déterminée (femme faisant le trottoir ou travaillant dans un « café » ou une maison close), dans la réalité, la prostitution étend ses ailes à d'autres milieux et affecte de plus en plus de jeunes des deux sexes. Plus ou moins affichée, cette tendance est ignorée par ceux qui ne veulent pas voir et est encouragée par l'absence de contrôle de certianes institutions. Ainsi, il est courant de voir des écolières en uniforme traverser le seuil des hôtels de passe en compagnie d'hommes mûrs sans que cela ait l'air de choquer qui que ce soit, comme s'il était normal pour une mineure de seize ou dix-sept ans de fréquenter ce genre d'endroits, en compagnie d'un adulte qui pourrait être son père. Et si l'on habite la zone et que l'on observe le phénomène, on se rend rapidement compte qu'elle vient régulièrement, mais avec des compagnons différents. Il faut vraiment faire exprès pour ne pas comprendre. Avec tact et de patience, nous avons pu obtenir que l'une de ces jeunes « professionnelles », que nons avons pu croiser dans un bar, non loin du Champ de Mars et que nous appellerons Marcia, nous fasse quelques confidences, sous couvert, évidemment, de l'anonymat.